Une équipe pour les grandes occasions
ANGERS. — Une catastrophe pour Nice. Un triomphe pour Angers, comparable à celui obtenu face à Saint-Etienne. La soirée de samedi fut le rendez-vous manqué par Guillou avec son ancien public, et plus encore la démonstration par l'absurde que onze réputations ne constituent pas une équipe.
Défaillance niçoise, certes, mais renouveau angevin éloquent par les chiffres et la manière, surtout en première période. Dès le coup d'envoi, la concentration, la vigueur, l'esprit d'initiative du S.C.O. se manifestèrent sans retenue.
BARTHELEMY en véritable buteur
Jamais l'équipe azuréenne ne put prendre ses aises, comme sa tendance à l'embourgeoisement l'amène à le faire. Parce que le jeu rapide et profond choisi par Amersek, Lech et Edwige déconcerta et braqua l'attention sur l'association contre nature de Katalinski et de Guillou en défense centrale. Manifestement le colosse yougoslave s'ennuyait et... perdait totalement de vue qu'il devait surveiller l'un des avants-centre de première division possédant le plus de culot, d'astuce et aussi d'efficacité : Barthélémy.
La joie de vivre et de jouer de l'Angevin éclata d'autant plus que Guillou inventait, à ses dépens, la fonction de « faux libéro », davantage porté vers la relance du jeu et sa construction que sur sa destruction ; il adopta une position avancée qui l'obligeait à des retours en catastrophe précipités par l'invraisemblable comportement de son stoppeur en titre. Et quand il décida de reprendre sa place de prédilection au milieu du terrain, il était trop tard : Barthélémy avait déjà frappé trois fois.
Dès la huitième minute le buteur angevin mit à profit une grossière erreur de Adams — incapable de contrôler un centre tir de Citron à cinq mètres des buts — pour expédier la balle sous la transversale. Huit minutes plus tard, Barthélémy, grâce à son coup d'œil, expédia dans la cage déserte une balle repoussée par Baratelli ; à l'origine une nouvelle gaffe du défenseur niçois Douis, déviant trop faiblement un ballon à destination de son gardien (16e).
Quatre minutes avant le repos, avec la clémence du juge de touche ne bronchant pas sur un hors-jeu manifeste, Barthélémy utilisa une petite passe de Lech pour contourner Baratelli et donner à l'avance angevine un caractère décisif (41e).
C'était son jour de réussite, car le quatrième but qu'il signa vingt minutes plus tard n'aurait pas dû être accordé non plus. Amersek effectua d'ailleurs l'essentiel du travail en prolongeant l'action sur la droite de la surface de réparation et en prenant à revers tous les niçois, accourus, par une superbe passe en retrait. Lech, surgissant de l'arrière, tira instantanément. La balle se dirigeait hors du cadre, mais sur la trajectoire, et en position de hors-jeu, Barthélémy, seul devant Baratelli, la dévia victorieusement (65e).
CHASTIN et AMERSEK : style opposé et... efficace
De telles circonstances pourraient faire imaginer que la chance et le désarroi adverse apportèrent la victoire sur un plateau. Loin de là ! Même avec deux buts refusés, le S.C.O. aurait acquis un confortable succès. Et toutes les occasions enregistrées sont aussi importantes d'une certaine manière que les réalisations.
L'équipe angevine, samedi soir, possédait du rythme, du tempérament et du panache. Et si la défense centrale niçoise en perdit son latin, de même que le milieu de terrain bien décevant, que dire de la production des deux arrières latéraux ? Douis, en particulier, fut sans cesse pris de vitesse par Chastin. Voilà une recrue à bon marché, ramenée de Chaumont, qui bouleversa tous les plans tirés par les millionnaires niçois. Certes son football n'a rien d'une composition de maître ; mais quel souci pour l'adversaire direct. Rapide, hargneux, obstiné, et pas si maladroit qu'on a voulu le décrire à ses débuts sous le maillot angevin. Douis s'en souviendra. Son entraîneur l'envoya méditer dès la pause sur la manière de barrer la route à un débutant qui n'a pas froid aux yeux.
Dans un tout aure registre, Amersek révéla ce qu'est un football de classe, confirmé, par les appels de ballon, la justesse et l'intelligence de jeu et ses tentatives de tirs au but. Sa réputation à lui n'a rien d'usurpée.
Dans le camp en face, seul son compatriote Bjekovic se mit au diapason avec Sanchez et Jouve par intermittence. La supériorité angevine se manifesta donc par l'audace et le mouvement. Elle aurait pu emprunter d'autres voies pour se traduire au tableau d'affichage. Une belle tête plongeante d'Edwige sur le poteau (10e), deux essais précis d'Amersek (19e et 88e), deux sauvetages de Katalinski pour contrer une tête d'Amersek à nouveau (26e) et de Jouve à la retombée d'un lob d'Edwige (56e).
Les deux arrières niçois suppléèrent sur la ligne leur gardien qui dut se jeter encore dans les pieds de Barthélémy (31e) et n'eut d'autre ressource que de faire basculer Edwige, idéalement servi par Amerserk, à l'ultime minute. Bernard Lech ne manqua pas, sur le penalty, d'accentuer la déroute niçoise.
La prochaine grande occasion tombe dans quinze jours, avec la venue du leader, le F.C. Nantes.
Michel BIHAN.
Angers : Fouché ; Citron, Brulez (puis Augustin, 82e), Baudry, Cassan ; Lech, Ferri, Edwige ; Amersek, Barthélémy, Chastin. 13e homme : Gonfalone.
Nice : Baratelli ; Douis (puis Ascery, 46e), Katalinski, Guillou (puis Adams, 43e), Zambelli ; Jouve, Adams (puis Guillou, 43e), Huck ; Sanchez, Bjekovic, Toko. 13e homme : Castellani.
De bonnes nouvelles de Boskovic. Le Yougoslave, opéré vendredi à Lyon, a été plâtré et quittera sa gouttière mardi. Il espère quitter la clinique du professeur Trillat samedi.
Angers - Nice. - Amersek s'infiltrant entre Zambelli et Adams fut une menace constante pour Baratelli.
Article Ouest France. Scan cris72.