Article paru dans France Football du 11 octobre 1980. Merci à Fanch Gaume pour le scan.

ANGERS ET LAVAL DANS LA ZONE ROUGE

Après une trêve d'une dizaine de jours, l'avant-scène étant occupée par l'équipe de France, le Championnat reprend son cours cette semaine, au sprint, avec deux journées en trois jours. Derrière les deux locomotives de tête (Saint-Etienne et Nantes), les autres participants s'essoufflent et se trouvent, plus ou moins, distancés. Des groupes se forment, se déforment, au hasard du parcours, trois équipes « traînant » actuellement en queue de classement : Laval, Auxerre et Angers. Le cas d'Auxerre, nouveau promu, étant particulier, on se penche, aujourd'hui, sur les situations que connaissent ces deux grands de l'Ouest : le Stade Lavallois et, encore plus, le Sporting Club Olympique d'Angers, classé dernier avec, seulement, sept points.

Faut-il être inquiet pour ces deux clubs, Laval, pensionnaire de la Division I depuis la saison 1976-1977, le retour du SCO étant plus récent, 1978-1979 ? Pas vraiment, semble-t-il. Les entraîneurs, comme les présidents, sont loin d'agiter le signal d'alarme, admettant que la position de leurs équipes est préoccupante, mais ne nécessite quand même pas un plan d'urgence. Angers, comme Laval, font face à leurs problèmes avec une certaine sérénité, et il n'est pas question, ici, de révolution.

Des moments difficiles, les deux clubs en ont déjà vécu dans le passé, et depuis son entrée en Division I, Laval a toujours terminé à un rang honorable : seizième en 1976-1977, dixième en 1977- 1978, seizième en 1978-1979, douzième en 1979-1980, à la force du poignet. Les Angevins ont fait preuve d'une régularité moins grande, en faisant l'aller et retour entre les deux Divisions, terminant dix-septième en 1978-1979, quatorzième en 1979-1980.

Aussi, alors que le Championnat boucle tout juste son premier tiers, l'heure n'est vraiment pas à l'affolement, et du côté d'Angers comme de celui de Laval, on analyse la situation dans le calme, avec un esprit de concertation. Il n'est pas dans le genre de ces deux maisons de l'Ouest d'avoir recours aux grands moyens ; on fait, précisément, selon ses moyens, et Michel Le Milinaire et Elie Fruchart ne prétendent pas se mêler à la lutte pour les cinq ou six premières places. Mais il existe un lot d'équipes, de valeur proche, et sur celles-là, Laval et Angers espèrent prendre le meilleur, dans un avenir proche, et se retrouver dans des eaux plus calmes.

Fruchart : « Ne paniquons pas ! »

« Quel est le principal sentiment que vous inspire la dernière place de votre club?

— Incontestablement un sentiment de surprise. C'est une hypothèse que je n'avais absolument pas envisagée avant le début de saison.

— Quelles sont les causes de cette situation ?

— Nous avons connu une multitude de petites vicissitudes dues autant à des problèmes de santé qu'à des blessures. Et tous concernaient des éléments moteurs qui se sont trouvés handicapés au même moment.

— L'explication vous semble-t-elle suffisante ?

— Je le crois.

— Ne pensez-vous pas avoir raté votre recrutement ?

— En ce qui concerne les nouvelles recrues je n'ai aucune déception. Pas un seul de ces nouveaux joueurs n'est passé complètement à côté du sujet.

— Mais tous ne rendent pas las mêmes services.

— Pour l'instant seul Bousdira est irréprochable. Il est fidèle à son image de marque et évolue à son meilleur niveau. Mais il est trop seul et ses efforts ne peuvent être couronnés de succès. Les autres ont tous été handicapés à un moment ou à un autre, mais ils n'ont jamais failli à leur tâche.

— Même Marc Berdoll ?

— Bien sûr Marc peine à retrouver la forme. Il a arrêté de fumer, ce qui est louable. Mais il a aussi pris trois kilos qu'il s'efforce actuellement de perdre.

— Croyez vous toujours en lui ?

— C'est un garçon qui est très connu et très apprécié à Angers, ce qui est normal. Pour ma part je le connais mal. Je constate qu'il n'a pas encore montré ce dont il est capable dans le domaine de la finition. Il n'a pas beaucoup joué l'an dernier à l'OM. C'est peut-être un handicap. Mais sa bonne volonté ne peut être mise en cause et je me refuse a croire qu'à vingt-sept ans il ait perdu toutes ses qualités. Il ne s'agit, je l'espère, que d'une éclipse momentanée.

— Votre défense ne donne pas non plus toute satisfaction ?

— Là, par contre, ce n'est pas vraiment une surprise, mais je croyais que nous compenserions dans d'autres domaines ce que nous perdrions dans ce secteur. Pour ma part je désirais garder Brûlez, et je l'avais dit dès le mois de décembre. Tout semblait réglé lorsque à la dernière minute il est parti à Tours. Nous n'avons guère eu le temps de faire face. Il n'est pas possible de faire bonne figure en Première Division sans une défense solide. Or, notre défense centrale est beaucoup trop jeune. La valeur des joueurs qui l'ont composée jusqu'à aujourd'hui n'est pas en cause, mais ils sont trop inexpérimentés. Elle rend les services que l'on pouvait en attendre, sans plus. C'est pourquoi l'arrivée de Wiencerz est importante. Le Polonais n'est pas un superjoueur, mais il possède l'expérience. J'espère qu'avec lui nous serons capables de préserver un résultat.

— La situation ne vous parait donc pas désespérée ?

— Bien sûr que non. L'ambiance est encore bonne parmi les joueurs, et le fait que le groupe des pros soit limité à douze joueurs n'y est pas étranger. Si tout le monde revient en forme nous sommes tout à fait capables de repartir de l'avant. Seulement il ne faut plus traîner car nous sommes guettés par la dynamique de la défaite qui s'abat souvent sur la lanterne rouge. Il nous faut donc réagir au plus vite.

— Votre comité directeur vous a suggéré, pour y parvenir, de faire appel aux jeunes. Qu'en pensez-vous ?

— Je pense qu'entre un joueur confirmé et un jeune, j'aurais toujours tendance à choisir le joueur confirmé. Surtout dans notre situation. Nous avons quelques bons jeunes, mais il n'est pas question d'opérer une transfusion importante. Ce ne serait pas intelligent. Je vais procéder à une redistribution des rôles, à un remodelage, mais pas à une révolution.

— Le fait que les dirigeants vous donnent des conseils vous gène-t-il ?

— Dans une équipe dirigeante chacun est libre d'exprimer son opinion. Parfois un entraîneur peut trouver de bonnes idées dans les propositions qui lui sont faites.

— Vous sentez-vous menacé ?

— Mon autorité n'a jamais été remise en cause. C'est très important. Je travaille en toute sérénité. Dans d'autres clubs, et dans une situation identique cela se passerait différemment. A Angers tout le monde se serre les coudes. C'est pour cela que je suis persuadé que nous nous en sortirons.

(Recueilli par G. Ejnes)


Le SCO attend avec impatience le réveil de Marc Berdoll, son buteur.

LE PRESIDENT KELLER « INCOMPRÉHENSIBLE »

Angers et son équipe profondément remaniée lanterne rouge du Championnat, et voilà son président qui se tape la tête contre les murs en se demandant : « Comment est-ce possible ? » Et le voici aussi qui cherche des solutions.

« Bien sûr, neuf changements à l'intersaison, c'est beaucoup. Mais tout de même, les joueurs que nous avons pris ont tous une certaine réputation et nous ne nous attendions pas à de telles difficultés. J'étais persuadé qu'avec cette équipe nous ne connaîtrions aucune difficulté. C'est pourquoi la situation actuelle me navre. Il n'y a pas encore péril en la demeure, mais il a bien fallu réagir. C'est ce que nous avons tenté de faire la semaine dernière, en nous livrant à un vaste brassage d'opinions.

Mais que l'on ne s'y trompe pas. Angers n'est pas Strasbourg et il n'y a pas de conflit entre le président et l'entraîneur. Fruchart garde toute ma confiance. Par ailleurs, l'entente au sein de l'équipe est excellente. Pourtant le fonds de jeu ne correspond pas a ce qu'il devrait être. C'est à Fruchart, et à lui seul, de trouver des solutions. Certes, nous avons eu de la malchance ; beaucoup de joueurs ont été malades ou blessés. Mais maintenant, il ne faut plus traîner. Berdoll doit revenir à son meilleur niveau et Wiencercz s'imposer en défense. Bousdira, Iddir, Larvaron ou Cappadona sont de bons joueurs. Je reste persuadé que notre recrutement a été bon. A l'entraîneur de chercher pourquoi tous ces joueurs n'ont pas leur meilleur rendement. Rien n'est perdu. Notre situation est embêtante. Elle a des conséquences financières, car le public ne répond plus. Sur ce plan, on va sans doute avoir des difficultés mais il n'y a pas lieu de s'alarmer. Il faut simplement essayer de ne pas agrandir le petit trou que nous avons actuellement dans la poche, et pour y parvenir il n'y a qu'une solution : sortir bien vite de l'ornière dans laquelle nous nous sommes fourrés. »