Les Jaunes un genou en terre

De notre envoyé spécial Robert VERGNE

ANGERS et NANTES : 1-1 (0-0). — Temps froid. Eclairage moyen. Terrain collant. Arbitrage de M. Konrath. 194.500,60 F de recette pour 11.307 spectateurs. Buts : Amerseck (48e) pour Angers ; Rampillon (49e sur pen.) pour Nantes. Remplacement : Princet par Gonfalone (72e) à Angers. Avertissements à Augustin et Cassan à Angers ; Muller à Nantes.

ANGERS. — Le moins que l'on puisse dire, c'est que les Nantais ont eu chaud, en dépit de la température plus que fraîche régnant sur l'Anjou samedi soir. La superbe série de huit victoires consécutives qu'ils avaient épinglées à leur palmarès faillit bien être stoppée net et si elle ne le fut qu'à moitié, les Nantais le doivent davantage à une circonstance heureuse pour eux qu'à leur propre mérite : en l'occurrence, un penalty sur lequel on reviendra.

Cela dit, les hommes de Vincent n'ont certes pas usurpé cette demi-victoire, encore que celle-ci soit davantage à considérer comme une semi-défaite.

En effet, à l'exception de quelques courts éclairs, au cours desquels la classe individuelle de certains et la maîtrise collective ressortirent enfin, les Nantais semblaient s'être englués sur la pelouse collante du stade Jean-Bouin. Certains semblaient même en fin de match avoir des semelles de plomb, ce qui est pour le moins curieux au pays de l'ardoise.

Il faut dire que l'adversaire angevin porte une responsabilité certaine dans cette situation. Pourtant, les élèves d'Aimé Mignot avaient bien des raisons d'appréhender ce match, ne serait-ce que parce qu'ils n'en avaient disputé aucun (du moins officiel) depuis le 17 décembre.

Or ce sont les Nantais qui donnèrent l'impression de plus grande fatigue en fin de match. Ensuite, les Angevins avaient le souvenir de la cuisante défaite subie lors du match aller. On n'oublie pas aisément ce genre d'humiliation.

Enfin, il y avait cette fameuse euphorie nantaise qui faisait peur à tout le monde et à laquelle les fameux Stéphanois eux-mêmes n'avaient pas échappé.

Des Angevins décidés

Bref, on n'en menait pas large avant le coup d'envoi sur les bords de la Maine, ce qui explique peut-être que le stade Jean-Bouin, certes confortablement garni, n'était tout de même pas plein à ras bord, comme on aurait pu le croire pour cet événement.

Mais on sut rapidement que les absents, cette fois, avaient eu tort, car, à la mi-temps, les Nantais étaient loin de s'être amusés. Les Angevins semblaient très décidés, comme en témoignaient leurs attaques de balles très vigoureuses. Comme ils avaient resserré leur défense, sans doute en souvenir du match aller, il devenait certain que leurs adversaires et spécialement les attaquants n'avaient pas la partie facile.

Néanmoins, il est juste de préciser que la seule véritable occasion très nette de but fut à mettre à l'actif des visiteurs, en l'occurrence Baronchelli (21e), qui, après un « une-deux » avec Rampillon, décocha un tir magnifique sur la barre transversale. Comme Janin avait très légèrement effleuré le ballon, on peut estimer qu'il fut assez chanceux en la circonstance.

En revanche, si les Angevins ne connurent pas une occasion aussi franche, ils n'en inquiétèrent pas moins l'excellent Bertrand-Demanes à plusieurs reprises. C'est ainsi que Lecornu (12e), à la suite d'un excellent dribble, et Félix par deux fois (26e et 37e) créaient un danger réel pour la défense nantaise.

Mais l'excellent coup franc de Félix fut remarquablement arrêté par le gardien international, tandis que « Fanfan » tergiversa un peu trop lorsque Cassan lui adressa une passe lumineuse.

En fait, ce score de parité à la mi-temps reflétait assez bien la physionomie d'ensemble, le milieu de terrain angevin faisant largement jeu égal avec son vis-à-vis nantais.

Malheureux Cassan

La seconde partie du match devait être celle de l'action plus tranchée sanctionnée par un but dans chaque camp. Mais autant celui du SCO fut remarquablement limpide, autant celui de Nantes fut plutôt stupide.

Le jeu venait de reprendre, lorsque Cassan adressa une très belle passe à Amerseck, prenant la défense nantaise, relativement figée, de vitesse, pour aller battre Bertrand-Demanes, malgré la sortie de celui-ci.

La joie des gradins était à peine retombée que l'on vit soudain l'arbitre montrer le point de penalty. Que s'était-il donc passé, car, dans la véritable buanderie qui sert désormais de tribune de presse au stade Jean-Bouin d'Angers, on n'y voit guère ? Tout simplement, Cassan avait manié la balle, « volontairement », dit l'arbitre, ce qui explique le penalty, « pour me protéger », affirme Cassan. Dans les explications qui suivirent, il écopa même d'un avertissement. Rampillon transforma en force ce penalty qui devait sauver Nantes.

Les événements auraient même pu se précipiter à cadence plus accélérée, rappelant le début du match de Saint-Etienne, puisque aussi bien Pécout eut, deux minutes plus tard, un but tout fait au bout du pied à la suite d'un tir d'une rare violence décoché par Oscar Muller. S'il avait eu un peu de sang-froid, en la circonstance, Pécout eût donné à son équipe une victoire qui aurait été un peu imméritée. Tout est donc bien qui finit bien, car si les Nantais donnèrent l'impression de démarrer enfin pendant le cinquième quart d'heure, le sixième et dernier permit aux Angevins de prononcer des attaques rageuses qui tinrent Bertrand-Demanes en alerte jusqu'au bout.

Ces péripéties avaient conféré au match l'essentiel de son intérêt, car, sur le plan technique, on a déjà vu mieux, il faut bien le dire.

Ce ne fut pas la faute des Angevins, Brulez, Lecornu, Cassan et de l'ex-Nantais Osman, qui fit une très bonne rentrée.

Même coresponsabilité en ce qui concerne Bertrand-Demanes, Tusseau, Rampillon et Oscar Muller dans le même cas qu'Osman.

ANGERS : Janin — Felci, OSMAN, BRULEZ, Le Lamer — Amerseck, Augustin, CASSAN — LECORNU, Félix, Princet, puis Gonfalone (72e). Entr. : Mignot.

NANTES : BERTRAND-DEMANES — Bossis, Rio, Bargas, TUSSEAU — Michel, MULLER, RAMPILLON — Baronchelli, Pécout, Amisse. Entr. : Vincent.


Baronchelli-Osman : partenaires hier, adversaires aujourd'hui.

Vincent : « Logique »

ANGERS. — Ce n'était pas la joie dans le camp nantais mais cependant pas la consternation non plus. Certes, on prend l'habitude de la victoire et ce match nul était comme une arête dans la gorge des « jaunes ». C'était d'ailleurs la couleur du rire de Vincent.

« J'ai l'impression d'être l'entraîneur d'une équipe battue, disait-il. Et cela ne trompe pas. Oui, Angers a bien mérité son match nul. Nous n'avons pas réussi à trouver la cadence supérieure qui nous avait permis de battre Saint-Etienne et aussi quelques autres équipes lors des derniers matches. Cela prouve que cette deuxième partie du Championnat sera beaucoup plus difficile qu'on ne le pense généralement. Mais pas seulement pour nous. »

Inversement, c'était la joie, mesurée certes, chez les Angevins : « Je crois que nous n'avons pas volé ce match nul, disait Mignot. Pour moi, c'est un point gagné et non pas perdu, bien que nous ayons joué sur notre terrain. D'ailleurs, combien d'équipes ont pris un point à Nantes, ces derniers temps ? »

Merci à L'Equipe pour l'article et à cris72 pour le scan.


Une accélération de Gilles Rampillon en plein cœur de la défense angevine. Brulez [NDLR Augustin], à terre, est battu, pas Cassan, à droite. (PHOTO ANDRE LECOQ)

Merci à France Football pour la photo et à cris72 pour le scan.