LES CHERCHEURS D'OR

Victor Péroni et Jacques Touffait vous révèlent les secrets des 20 clubs de Division I en matière de recrutement Qui, comment, pourquoi recrute-t-on ? Quels sont les clubs spécialistes des jeunes ? Les chasseurs de vedettes ? Une grande enquête de Football-Magazine.

Les recruteurs dans les clubs professionnels ont une tâche essentielle et délicate puisqu'elle consiste à détecter de jeunes talents un peu partout dans l'hexagone tout en essayant de « tomber à côté » le moins souvent possible.

C'est un travail qui le plus souvent n'est véritablement payant qu'à long terme ce qui en fait une partie de sa difficulté. Prospecter et recruter est en effet bien plus difficile que de chercher à prendre ça et là à coup de gros transferts des joueurs confirmés. Ce sont d'ailleurs deux choses bien différentes et bien souvent l'une n'empêche pas l'autre, mais en revanche il arrive que la politique de gros transferts ralentisse celle du recrutement et de la détection des jeunes qui préfèrent aller vers les clubs où ils ont une chance de « sortir ».

A l'époque du contrat à temps, le club qui possède un réseau de recruteurs bien structuré se trouve en définitive à la tête d'une petite fortune.

Ce n'est pas Saint-Etienne qui nous dira le contraire puisque tous les joueurs qui composent actuellement l'équipe stéphanoise — à l'exception de Curkovic et de Piazza — sont arrivés à Saint-Etienne alors qu'ils étaient encore juniors. Certains n'étaient que cadets. Grâce à cette politique Saint-Etienne a pu faire face sans trop de heurt à l'hémorragie qui lui vit perdre il y a trois saisons cinq de ses meilleurs joueurs d'un seul coup.

Sur le plan du recrutement et de son organisation Saint-Etienne a donc parfaitement réussi et peut être cité en exemple. Ce n'est certes pas partout pareil — cela serait évidemment trop beau — mais partout on tache d'accorder « la priorité des priorités » au recrutement souvent national à l'image de Saint-Etienne et de Nantes ou plus volontiers régional à l'image de Rennes et de Metz. [ndlr, on va se contenter de ne parler que du SCO ici.]

ANGERS : des coups gagnants

A Angers, on a l'habitude de ne jamais faire trop de bruit. On travaille en silence, mais Robert Lacoste depuis bientôt neuf années qu'il est le directeur sportif angevin a assez de métier, de connaissances dans tous les stades et clubs de France pour avoir parfaitement organisé son réseau d'informateurs.

Il travaille en parfaite communion d'idées avec Belo qui s'occupe des amateurs et qui, à ce titre, est appelé à voir beaucoup de jeunes et à enregistrer de très nombreux renseignements. Lorsqu'il vint a Angers, Lacoste y amena Albert Poli, ce qui, on l'avouera était déjà une fort bonne chose en matière de recrutement. C'est également lui qui fit venir Eric Edwige qui débuta à Mutzig. Car l'un des paradoxes de cette équipe d'Angers, c'est de posséder un excellent informateur et un homme de flair en Alsace.

C'est ainsi que si le S.C.O. en avait eu les moyens à l'époque, il aurait enrôlé Jean-Noël Huck et Marco Molitor que l'informateur alsacien signala à Angers avant même que Strasbourg ne pense à les recruter. D'ailleurs l'actuelle doublure de Gouraud, le gardien de but angevin, vient d'Alsace.

Mais ce n'est pas pour cela que la région autour d'Angers est négligée par les amis du S.C.O. et les anciens joueurs angevins qui ne manquent pas de signaler les hommes à qui il convient de prêter attention. C'est ainsi que fut découvert Marc Berdoll au cours d'un match de lever de rideau qui se déroulait à Angers. On l'avait déjà à l'œil — si l'on peut dire — mais ce match fut déterminant et c'est le président lui-même, le docteur Kerjean qui, ayant consulté Lacoste et Belo, alla trouver à Trélazé les parents du jeune Marc pour traiter l'affaire au plus vite. Car Nantes était également sur les rangs. Jean-Marc Guillou lui aussi était visé par Nantes lorsqu'il vint à Angers. Il opérait alors dans une équipe corporative.

A Angers, club qui n'est pas tellement structuré et qui ne peut rivaliser avec les clubs qui occupent comme lui les places d'honneur du classement, on procède encore en matière de recrutement par la méthode du « coup par coup », mais en général, ce sont des coups gagnants qui permettent de modifier de temps en temps le visage de l'équipe sans jamais en changer le style et l'image de marque. Ce n'est pas si facile que ça lorsqu'on a peu de moyens et presque pas de public.


Poli : dans la valise de Lacoste.

Merci à Football Magazine (décembre 73) pour l'article et à Rodighiero pour le scan.