Bordeaux - Angers

A la force du jarret

BORDEAUX (de notre envoyé spécial). — Hier après-midi, les esthètes ont dû se voiler les yeux ou ont quitté le stade bien avant 16 h 45. Et si le contentement de l'œil n'a pas trouvé à s'exprimer, la faute n'en incombe pas seulement aux Angevins, qui luttent avec les moyens du bord, pour recoller le peloton des premiers attardés.

Les Bordelais, devant leur public, malgré un esprit tranquillisé par une position au milieu du tableau, furent dans l'incapacité de maîtriser leurs sujets, excepté lorsque ce grand bonhomme qu'est le petit Giresse, touchait le ballon et, à un degré moindre, Tokoto.

A ce passage à vide de l'équipe locale on attribue les méfaits d'une tournée hivernale dans le golfe Persique. Pour une poignée de pétro-dollars, les Girondins ont peut-être gâché les possibilités d'une très belle place finale que Nîmes (c'est un symbole !) occupe aujourd'hui.

BERDOLL ET GIRESSE TROIS A TROIS

Quant aux Angevins ils furent à la fois trahis et sauvés par Berdoll. Résistant à une faute grossière de Barrat, l'attaquant angevin servi par Guillou se présenta seul devant Gallina dès la 8e minute. Il ne put synchroniser feinte et tir et Gallina se retrouva à terre avec la balle dans les bras.

Coincé, in extremis, à deux reprises, 40e et 42e, sur deux passes de Cassan, Berdoll laissa seulement planer le danger sur le camp bordelais.

Il devint encore plus menaçant dès la reprise en prenant de vitesse la défense centrale, mais face à Gallina, il plaça un tir au ras du poteau, à l'extérieur des buts.

Il ne pouvait gâcher aussi longtemps de la marchandise et il profita d'une offensive menée en deux coups de cuillère à pot pour ouvrir la marque.

Damjanovic, jaillissant et clairvoyant comme au plus beau jour, alerta Edwige à l'aile droite qui s'engouffra dans l'espace libre ouvert par une position défectueuse de Dubouil.

Berdoll contrôla le centre et ne laissa aucune chance à Gallina (56e minute).

Dans son élan, il se paya le luxe de venir s'opposer à une contre-attaque de Barrat, à la limite des 18 mètres.

Poussé, Berdoll se rebella et fut pénalisé d'un coup-franc.

Ciaravino le botta à mi-hauteur. Giresse, libre de toute surveillance, du sommet du crâne, dévia la balle qui descendit en chandelle dans le dos de Janin et vint mourir entre le poteau et les filets (58e).

Comme au match aller où Berdoll et Giresse marquèrent les deux buts respectifs de leur équipe, les deux hommes n'arrivaient pas encore hier à se départager.

M. MEEUS CONSPUÉ

M. Meeus dans ce match à l'arrachée où les contacts étaient nombreux, ne réussit guère à maîtriser les événements. Il se signala par des décisions à contre-sens qui pénalisèrent tour à tour les deux équipes. Angers en souffrit dès le début du match où, plus motivé que son rival, il mit en lumière les insuffisances de la défense bordelaise. Ainsi, Antic et Laurier trouèrent ce rempart dès la 8e minute, mais sans résultat concret. Par la suite, une combinaison Cassan-Edwige fut stoppée par l'arbitre parce que Arribas rata son fauchage sur l'attaquant angevin (11e minute). Dans le même ordre d'idées, Edwige grillant deux adversaires grâce à son coup de reins, fut proclamé hors jeu (12e minute) !

Le climat qui se détériorait, malgré les premières actions collectives dignes d'être notées du côté bordelais (il fallut attendre la 25e minute !) ; aboutit à une blessure de Antic. Au moment de disputer avec Edwige une balle aérienne à Sarreau, le Yougoslave fut projeté à la renverse et retomba sur un coude. Sortant du terrain, il fut remplacé par Barot. En fait, Cassan quitta son poste d'arrière latéral pour glisser à l'aile gauche (30e minute). Cela ne refroidit personne et ne donna pas un pouce de lucidité supplémentaire à l'arbitre qui dut quitter le terrain à grandes enjambées, poursuivi par deux ou trois joueurs bordelais. Ceux-ci avaient tort, bien sûr.

Lorsque Damjanovic repoussa du bras un centre en retrait de Couécou, rentré en jeu à la 70e minute, il tournait le dos au ballon et on ne voit pas de quelle façon il pouvait le manier volontairement (84e minute).

Mais, ce n'était qu'une péripétie parmi une série de décisions aberrantes, dont l'aboutissement se fit aux dépens des Angevins, lorsque Berdoll, s'infiltrant au milieu d'un paquet d'adversaires, fut projeté au sol par plusieurs coups ravageurs (85e minute). A vrai dire, les Girondins s'en voulaient de ne pas être sortis vainqueurs du débat. Un tir superbe de Ciaravino (46e minute), deux reprises très sèches de Tokoto (54e et 61e minutes), deux excès de confiance de Cassan et Le Boëdec dans leur propre surface de réparation (47e et 78e minutes), leur donnèrent des instants prématurés de joie. Sur la dernière action citée, Arribas servit Couécou, dont la reprise fut impitoyable. Mais, le remplaçant se trouvait bel et bien hors jeu, malgré toutes ses dénégations.

De ce débat confus et amer, on retiendra pourtant la très belle production de Damjanovic, l'excellent comportement de Laurier et aussi de Le Boëdec, Cassan et Janin, même si tous les trois peuvent battre leur coulpe pour une erreur de taille, avec une mention spéciale à Ferri, dont la maîtrise technique et la présence furent impressionnantes.

Michel BIHAN.

Les équipes

Bordeaux. — Gallina ; Sarreau, Dubouil, Largouët, Barrat ; Giresse, Goubet, Arribas ; Tokoto, Lattuada, Ciaravino (puis Couécou, 70e).

Angers. — Janin ; Cassan, Damjanovic, Brulez, Laurier ; Ferri, Guillou, Le Boëdec ; Berdoll, Edwige, Antic (puis Barot, 30e).

Antic : luxation du coude

Touché dans les circonstances relatées par ailleurs, Antic a été conduit à l'hôpital immédiatement pour passer une radiographie. Celle-ci n'a révélé aucune fracture ni fêlure du coude : une luxation semble-t-il, sera son souvenir de ce match mais cette blessure qui lui fait porter un énorme bandage, le contraindra à au moins quinze jours d'arrêt total.


BORDEAUX - ANGERS. — Halte là... on ne passe pas ! Dans ces conditions, il est bien certain que le Bordelais (Jean-Pierre Tokoto) aura bien du mal à se débarrasser de ses deux gardes du corps (Alain Laurier et Philippe Barot).

Merci à Ouest-France pour l'article et à cris72 pour le scan.