Superbe et généreux, le S.C.O. faillit crucifier les « Verts »

SAINT-ETIENNE (de notre envoyé spécial). — Le 2 avril 1977 faillit bien être une date historique dans les annales du football français. Ce soir-là, l'A.S. Saint-Etienne recevait le modeste S.C.O. d'Angers. Ce ne devrait être qu'une formalité pour les hommes de Robert Herbin. Sans doute, les Angevins avaient-ils crucifié les Stéphanois au stade Jean-Bouin. Mais à Geoffroy-Guichard, ce serait autre chose. Pas une équipe française ou étrangère ne s'est imposée dans l'enfer vert depuis que Nantes réalisa l'exploit au cours de la saison 1972-73...

Ce que Kiev, le Bayern, Eindhoven et Liverpool n'avaient pu réussir, le S.C.O. fut à deux doigts d'y parvenir ! Eh oui, grâce à Brulez, les Angevins menaient 1-0 à la pause. Dès la reprise, Barthélémy eût pu saisir l'occasion de battre Curkovic pour la seconde fois de la soirée. Les dés eussent été jetés !...

De toute manière, Angers gardera un merveilleux souvenir de ce match superbe et généreux fourni par onze garçons (enfin) décidés à sauver leur place en Première Division. Tous les témoins de cette partie épique furent unanimes pour dire bravo les blancs. Seuls les cardiaques pouvaient avoir quelques raisons de se plaindre.

Je n'avais, pour ma part, jamais eu l'occasion de voir le S.C.O. se comporter de la sorte. Les complexes avaient été soigneusement rangés aux vestiaires. Par contre, courage, intelligence et prise de risque raisonnée furent les dominantes de l'admirable match fourni par les joueurs du S.C.O. De Jean-Michel Fouché qui réussit des arrêts extraordinaires à Jean-Claude Chastin, toute l'équipe doit être louée. Il faut souhaiter que les habitués du stade Jean-Bouin puissent vivre souvent de pareils instants.

BRULEZ amena le silence

Car il n'y eut pas de temps mort. Pas de round d'observation. Rocheteau mit immédiatement le feu aux poudres et Chastin dut revenir à grandes enjambées pour sauver son camp (1'). Hum ! Les affaires angevines étaient déjà en baisse. Elles le furent plus encore dans la minute suivante, lorsque Janvion tira puissamment. Fouché concéda le premier corner d'une série de 17...

Le S.C.O. desserra l'étreinte sans trop de mal. Apparemment Un centre de Lech (6') loba Barthélémy et Piazza, mais Amerseck ne put inquiéter Curkovic. Ce ne fut que partie remise. Deux minutes plus tard, en effet, l'élégant Yougoslave adressa une transversale pour Heslot qui s'échappa et obligea Curkovic à lui plonger dans les pieds. Le petit dernier de Mignot, loin de s'affoler, garda le contrôle de la balle et servit Chastin à 35 mètres des buts stéphanois. Ce dernier tira promptement et Curkovic, à peine de retour sur sa ligne, détourna miraculeusement en corner.

L'alerte avait été chaude. Les « Verts » restèrent comme abasourdis. Leur créer de tels problèmes dans leur antre était assurément un comble ! Ils n'étaient pourtant pas arrivés au bout de leurs peines.

Les cris redoublèrent pendant 8 minutes. Puis un silence de mort envahit les tribunes. La balle était au fond des filets de Curkovic. Bel et bien, ce n'était pas un poisson d'avril. Une montée de Brulez, deux relais avec Barthélémy et Lech, un tir au ras du sol du premier nommé et Saint-Etienne était mené 0-1.

Les k.o. manqués

Les « Verts » étaient fâchés. Sous l'impulsion de l'excellent Larqué et de l'inévitable Bathenay, ils tentèrent immédiatement de remonter leur handicap. En deux minutes, ils auraient pu renverser la vapeur. Mais Patrick Revelli ne fit pas preuve de suffisamment de maîtrise. Larqué le servit remarquablement, alors qu'il se trouvait seul à 2 mètres de Fouché. Sa reprise de la tête que la balle passa largement au-dessus de la transversale (18'). Le même Larqué adressa une reprise puissante que Fouché parvint à repousser... dans les pieds de Patrick Revelli dont le tir fulgurant fut renvoyé par le montant gauche des buts de Fouché qui n'avait pas encore eu le temps de se remettre de ses émotions (19').

Rocheteau prit ensuite le flambeau et Fouché dut s'employer pour éviter le pire à la suite d'un centre-tir vicieux décoché par « Gentleman 7 ! » (24'). Ce dernier sema encore le désarroi dans la défense angevine au sein de laquelle il s'infiltra (26'). Il centra en retrait. Santini contôla la balle et expédia un « bolide » que Fouché stoppa en deux temps. Et avant la pause, une reprise de la tête de Rocheteau inquiéta à nouveau le S.C.O (31').

Mais de toute évidence, malgré la valeur de Fouché et de Boskovic imperturbable au centre de la défense, Saint-Etienne avait eu les moyens de réussir le k.o.

Les choses vont si vite en football qu'aussitôt après la pause le S.C.O. manquait à son tour « son » k.o. Larqué perdit la balle près de la ligne médiane. Lech s'en empara et ouvrit remarquablement pour Barthélémy qui se présenta seul devant Curkovic. Le gardien stéphanois eut d'extrême justesse le dernier mot.

Verdun...

Fouché et Edwige l'eurent aussi pour éviter que Larqué n'égalise (48' et 49'). M. Verbeke vint en aide aux Stéphanois lorsque Barthélémy lança Chastin à l'assaut de Curkovic en sifflant hors jeu alors que Piazza était à la traîne (50') et les « Verts » commencèrent à s'énerver. Larqué courut en direction de l'arbitre pour lequel il eut des mots doux et Piazza fit de même un peu plus tard... en toute impunité. Mais quand Amersek tira Bathenay par le maillot, il écopa un avertissement et un coup de poing en prime !

Qu'à cela ne tienne, l'énervement des Stéphanois ne leur ferma pas totalement les yeux. L'écran angevin faisait merveille devant Fouché. Ferri, Edwige et Cassan pouvaient ainsi placer des banderilles. Mais le bombardement ne tarda pas. Dans les dix-huit mètres angevins, c'était Verdun. Et les « grosses Bertha » étaient nombreuses.

A la suite d'un coup franc concédé par Heslot, on crut au but. Larqué alerta Lopez qui catapulta la balle de la tête hors de portée de Fouché. Du moins les spectateurs en furent-ils un instant persuadés. Le gardien angevin eut à nouveau le réflexe qui sauve (58').

Par contre, il dut s'incliner 7' plus tard. Un centre de Larqué en direction de Santini. Cassan renvoya de la tête... dans le dos de Brulez et Santini put égaliser. Et sous les cris farouches de leurs supporters, les « Verts » se mirent à bombarder de plus belle.

P. Revelli manqua une belle occasion (67'), puis Fouché sauva superbement son camp à trois reprises : à la suite d'un tir terrible de Larqué (74'), en repoussant du pied un essai de Bathenay (82'), enfin en « sortant » de la lucarne une balle expédiée par Rocheteau (83').

Le S.C.O. avait, de son côté, attaqué chaque fois que la « machine verte » le lui avait permis. Amersek et Lech (69') avaient échoué de peu, alors que Curkovic avait dû s'employer pour repousser du poing un centre d'Amercek attendu par Chastin (80').

Les Angevins eurent même le dernier mot puisque Heslot — en position d'ailier droit ! — et Amersek firent encore des leurs (89'). Ils avaient su mériter leur match nul qui, sur le plan moral, est une bien belle victoire.

J.F. CONTAMINE.

La fiche technique

STADE GEOFFROY-GUICHARD. — Pelouse souple. Temps frais. Très bon éclairage. 203.115 F de recette pour 76.524 spectateurs.

Arbitrage de M. Verbecke qui avertit Amersek (78').

A.S. Saint-Etienne et S.C.O. Angers, 1-1 (mi-temps, 0-1). Les buts : Brulez (16') pour Angers ; Santini (65') pour Saint-Etienne.

Corners : 17 (8 et 9) pour St-Etienne ; 5 (4 et 1) pour Angers.

SAINT-ETIENNE. — Curkovic, Janvion, Lopez, Piazza, Farison, Bathenay, Larqué, Synaeghel, Santini, Rocheteau, P. Revelli.

ANGERS. — Fouché, Cassan, Brulez, Boskovic, Heslot, Ferri, Edwige, Lech, Amersek, Barthélémy, Chastin.

Article Courrier de l'Ouest. Scan cris72.