QU'EST-CE QUI FAIT COURIR BARTHELEMY ?

Angers, 28 janvier.

LE 12 juillet 1976, jour de reprise de l'entraînement à Angers, parmi les nouveaux se trouvait un garçon de 24 ans, arrivant de Montélimar à l'issue d'un « raid » de treize heures de route dans une vieille 2 CV.

André Barthélémy avait eu du courage, puisqu'il venait là, un mois à l'essai, avec promesse « si ça marchait » de signer un contrat de stagiaire. Or, il avait abandonné l'idée d'aller à Boulogne où Langrand, son ex-entraîneur, lui avait obtenu la certitude d'être stagiaire suite à un stage de huit jours effectué dans le club nordiste [il doit me manquer une ligne] beaucoup réfléchi, mais comme il avait de toute façon l'intention de se lancer dans le professionnalisme, et suivant les conseils de Boulle, l'entraîneur de Montélimar où il opérait depuis deux saisons, il préféra viser plus haut et venir à Angers.

LA BONNE TROUVAILLE DE MIGNOT

C'est au cours d'un stage d'éducateur de football, à Voiron, qu'André Barthélémy tapa dans l'oeil de Mignot que le hasard avait nommé responsable du groupe au sein duquel travaillait ce garçon.

Au cours de la deuxième semaine du stage, Mignot commença à lui demander ce qu'il comptait faire. Quand l'ex-entraîneur lyonnais se sut définitivement engagé par Angers, il lui proposa donc cet essai d'un mois.

Voulant réussir, le Valentinois ne tarda pas à s'affirmer. Désirant trouver un successeur à Marc Berdoll, l'entraîneur angevin avait le choix entre Barthélémy et Ouattara, l'athlétique avant-centre opérant avec bonheur au sein de l'équipe de troisième division. Le 17 juillet, à Saint-Jean-de-Monts, chaque homme allait jouer une période, et Barthélémy, dès son entrée en jeu, battait Bergeroo, le gardien bordelais, de la tête.

C'était parti... et les buts allaient s'ajouter régulièrement les uns aux autres.

DEUX CLUBS ET UNE SELECTION

Comme tous les gosses, André commença à taper la balle dans la cour de récréation : celle de l'école Vidal, à Valence. A 11 ans, il est pupille au F.C. Lens [?] où il va gravir régulièrement les échelons pour jouer en troisième division sous la férule de Langrand, tout en obtenant son B.E.P. d'employé de bureau. C'est alors que Boulle, l'entraîneur de Montélimar, lui demande de venir jouer dans cette ville. Il y joue une saison en demi-teinte, puisqu'il est militaire au Plateau d'Albion (déjà la force de frappe !). Il marque néanmoins des buts (une quinzaine dont une dizaine de la tête) malgré le manque d'entraînement et les kilos superflus accumulés au cours de son service militaire.

Toutefois, l'année suivante, il connaît la joie d'une première sélection. Il joue avec la Ligue du Lyonnais, dans la Sélection des moins de 21 ans, et vient disputer un match à Guingamp, contre la formation correspondante de la Ligue de l'Ouest.

Assez curieusement, il ne vint qu'assez récemment à ce poste d'avant-centre, car il a joué ailier et même milieu de terrain défensif. Boulle lui fit travailler son jeu de tête, et le titularisa avant-centre.

SOUS L'AILE D'ERIC EDWIGE

L'accueil à Angers fut très bon, et tout de suite un ancien du club le prit sous sa protection. Là, nous devons saluer Eric Edwige, qui, systématiquement, et depuis longtemps, se met à la disposition des jeunes arrivant au club, pour les conduire et les distraire dans une ville qu'ils ne connaissent pas. Les emmenant à l'entraînement, les invitant chez lui, il joue véritablement le rôle d'une « mère poule » pour ces garçons loin de toute famille.

Angevin de longue date, Eric leur permet de s'installer au mieux à Angers, et il fait toujours tout ce qu'il peut pour leur rendre service. Le hasard a d'ailleurs voulu que Barthélémy obtienne un appartement en vis-à-vis de celui du capitaine angevin. Tout cela, ajouté à la confiance de Mignot, a certainement eu un heureux effet psychologique sur le comportement du nouveau buteur angevin.

Confronté tous les dimanches à des joueurs dont il connaissait la réputation par les journaux, ce fut pour lui, tout au long des matches aller, la découverte en chair et en os de ces gaillards dont on vantait les mérites.

« Pendant une dizaine de secondes avant le début du match, je les regardais, et je plaçais les noms sur leur visage. Puis, il n'y avait plus que le match qui comptait, et des garçons qui, tout à coup, étaient devenus des adversaires comme les autres, et qu'il fallait essayer de dominer. »

Nulle forfanterie dans ces propos, qui reflètent ceux d'un garçon équilibré et d'un gagneur tout entier au service de l'équipe.

« J'admirais et j'admire toujours Saint-Etienne, et chaque fois que je le pouvais, j'assistais aux matches des « Verts ». Avec Valence, j'avais joué contre la Réserve de Saint-Etienne. Avant le match, avec Luccacio, un de mes partenaires, ami d'enfance de Dominique Bathenay, j'avais eu l'occasion de bavarder quelques instants avec ce dernier. Cette saison, avant le match d'Angers, Dominique Bathenay est venu très gentiment me serrer la main et me dire quelques paroles aimables. Ce geste m'a beaucoup touché ! »

Ce qu'il ne dit pas, c'est qu'au cours des 90 minutes qui suivirent, il fut l'un des artisans de la victoire angevine sur Saint-Etienne.

Garçon attachant, une sensibilité à fleur de peau, il est en train de forcer l'admiration en réalisant quelque chose d'impensable à l'orée de la saison : faire oublier Marc Berdoll.

André MAROLLEAU

Article But. Scan cris72.