Cet extrait d'article, écrit par Jacques Thibert dans son Année du Football 1978, évoque le trente-deuxième de finale de Coupe de France entre Saint-Etienne et Angers.

Pour éviter aux clubs professionnels de Division I de se déchirer entre eux, de disparaître prématurément et de compromettre ce bel équilibre financier qui n'engendre qu'un déficit global de trois milliards d'anciens francs — on voit pire dans un budget gouvernemental — les dirigeants de la Fédération en ont fait des têtes de série au moment du tirage au sort des trente-deuxièmes de finale. Ainsi, pensent-ils, en vertu de la glorieuse incertitude du sport, tous se qualifieront pour la plus grande gloire de la Coupe de France figée dorénavant dans le marbre dont on a fait le tombeau de Napoléon.
C'est pourquoi un énorme éclat de rire ponctue l'élimination des quatre haltérophiles dont la barre de cinquante kilos a écrasé les illusions et les « petits petons » : Laval, battu 1-3 par Toulouse après prolongation ; Lens, vaincu 0-1 par Dunkerque ; Lyon, sorti par Ajaccio aux penalties ; et Rouen victime 1-2 de Limoges.
Deux autres ont été sauvés des eaux par la prolongation de trente minutes : Nantes, devant Le Havre, et Reims, devant Boulogne. Mais un troisième s'est sacrement mouillé les bottes, retrouvant même des écrevisses dans ses chaussettes : Saint-Etienne le grand, Saint-Etienne l'Européen, obligé de « cravater» l'Angevin Gonfalone, qui s'en allait au but, à la 97e minute, par Repellini, avant de se soumettre à l'épreuve des penalties, comme on le dit du sérum de vérité.
C'est Ivan Curkovic, attentif, expérimenté, équipé des gants de Sepp Maier, qui joue le sauveteur de l'île de Sein, en arrêtant deux des trois premiers « coups de pied au but ». On l'embrasse, on le congratule tandis qu'il explique sereinement : « Dans cette épreuve, c'est le calme qui compte. Il faut regarder les pieds du tireur, deviner son intention. Mais si on peut éviter d'en arriver à cette extrémité des penalties, c'est tout de même préférable. »
Patrick Revelli aussi est lucide : « Angers a été super-bon, et nous supermauvais. Mais en Coupe de France, l'essentiel c'est la qualification. » Les Verts, comme on peut le constater ne sont pas encore rouges de honte.


La séance tant redoutée des penaltys: Vili Amersek du SCO Angers contre le légendaire Ivan Curkovic de Saint-Etienne.