Chellat : « Angers a mûri »

Cette saison, le SCO Angers a décidé de sortir du néant. Les Angevins se sont libérés, métamorphosés, comme le prouve leur victoire sur Rennes (3-2) vendredi soir. Rencontre avec l'un d'eux, Farid Chellat, libero de son état et capitaine de surcroit.


Éric Van den Boogaard à la poursuite du libero angevin Farid Chellat : les rôles sont inversés. (Photo PADOGIS)

« COMMENÇONS par le plus récent et par cette victoire arrachée à Rennes, dans les toutes dernières minutes vendredi soir. Était-ce aussi important que cela de les battre ?

— Bien sûr que ça l'était. Ne serait-ce que parce que cela nous assurait de revenir sur eux, et donc de consolider notre place dans le groupe de tête.

— Quels sont les principaux enseignements d'un tel match ?

— Il y en a beaucoup, mais ce qui ressortira pas dessus-tout restera notre très grande volonté de l'emporter. Quand on pense qu'à deux reprises ils ont réussi à revenir au score et que, finalement, c'est nous qui avons eu le dernier mot, je crois que nous avons vraiment de quoi être satisfait.

— Avez-vous connu des moments de doute dans cette rencontre ?

— Ah oui ! Comment voulez-vous ne pas douter lorsque votre adversaire égalise à cinq minutes de la fin ? Mais nous sommes en pleine confiance depuis le début de la saison. Et c'est ça qui a fait la décision.

« Plus de sécurité »

— D'où vient cette confiance ?

— De plusieurs facteurs qui se sont bien associés les uns aux autres. Tout d'abord, grâce à des nouveaux joueurs comme Vermeulen, Pascal, Cabanel et Cantona, qui sont des gars hyper-sympas, et qui se sont très rapidement intégrés dans le groupe. Nous les avons mis tout de suite dans le bain sans que cela crée des problèmes de concurrence. A partir de là, une équipe type s'est dégagée. Ça aussi, c'est fondamental, tout comme le fait que, contrairement à l'an passé où il y avait pas mal de joueurs prêtés, chacun maintenant a un contrat avec le SCO.

— Est-ce réellement aussi important ?

— Tout à fait, car, grâce à cela, on sent chez les dirigeants l'envie de bâtir quelque chose à plus long terme. Ça nous apporte une sûreté, une sécurité que nous n'avions pas du tout la saison passée.

— Comment l'aviez-vous vécue ?

— Cela a été pénible. Je sortais d'une très bonne première saison ici, où j'avais connu un super-entraîneur, Pierre Garcia. On redémarrait avec Hervé Gauthier qui débutait. Ça n'était facile ni pour lui ni pour nous. Heureusement, dans la seconde partie du Championnat, nous avons vraiment senti une présence de tous les gens du club derrière nous. A partir de là, le message est mieux passé.

— Il y a quelques jours, votre entraîneur, Hervé Gauthier, insistait sur le fait qu'il avait manqué de maturité l'an dernier. A-t-il changé ?

— Oui, lui comme nous tous. En fait, nous avons tous mûri. C'est grâce à cela que nous réussissons aujourd'hui.

— Est-ce aussi, comme le rappelait Gauthier, parce que vous n'avez pas d'objectifs précis en ce qui concerne le classement ?

— Exactement. Par exemple, pour la venue de Rennes, nous voulions éviter à tout prix de nous mettre la pression. Au contraire, il nous fallait garder le même état d'esprit, c'est-à-dire de prendre les matches comme ils viennent. Bon, maintenant que nous en sommes là, on a envie que cela ne s'arrête plus (sourire).

« Retourner à Paris »

— Comment et pourquoi avez-vous hérité du brassard de capitaine ?

— Avant le premier match de la saison à Valenciennes, les joueurs ont voté. Et j'ai été élu. Ça m'a fait très plaisir, mais c'est peut-être aussi parce que je suis libero et que je fais partie des plus anciens du club.

— A vingt-trois ans !

— Oui, mais aussi parce que j'entame ma troisième saison ici.

— Il vous restera une année de contrat ensuite avec le SCO, quelle tournure aimeriez-vous donner à votre carrière ?

— J'aimerais bien connaître autre chose l'an prochain. Pour cela, je dois donner le maximum pour que des clubs soient tentés de croire en moi.

— Lesquels par exemple ?

— (Nostalgique) J'aimerais retourner sur Paris. Ça me manque, je suis né à Colombes. J'ai passé plus de vingt ans de ma vie là-bas. Je suis entré au Racing en pupille première année. Dès que j'ai une journée libre, j'y retourne.

— Pourquoi avez-vous quitté le Racing ?

— Après mes trois années de stagiaire, ils m'ont viré. Moi, j'ai continué à faire des bons matches en Division III, de sorte qu'un club me repère.

— Avez-vous eu peur que votre carrière s'arrête là ?

— Non, à aucun moment. Maintenant, je sais que si un club veut de moi, il se manifestera. »

Alain COHEN, à Angers

Merci à France Football (24 octobre 1989) pour l'article et à Marc M. pour le scan.