Jean-Marc GUILLOU

Le 02-06-1978, Mar del Plata (Parque Municipal, 42373 spectateurs)
Coupe du Monde
Arbitre : M. RAINEA Nicolae ( Roumanie)
ITALIE 2 - 1 (1 - 1) FRANCE
0:1 Lacombe (1), reprise de la tête aux 6m d'un centre de la gauche de Six, lancé par H. Michel.
1:1 Rossi (29)
2:1 Zaccarelli (54)

FRANCE :
BERTRAND-DEMANES Jean Paul (F.C. Nantes)
JANVION Gérard (A.S. Saint-Etienne)
RIO Patrice (F.C. Nantes)
TRÉSOR Marius (Olympique de Marseille)
BOSSIS Maxime (F.C. Nantes)
MICHEL Henri (F.C. Nantes)
GUILLOU Jean-Marc (O.G.C. Nice)
PLATINI Michel (A.S. Nancy-Lorraine)
DALGER Christian (A.S. Monaco)
LACOMBE Bernard (A.S. Saint-Etienne) puis 75 BERDOLL Marc (Olympique de Marseille)
SIX Didier (R.C. Lens) puis 76 ROUYER Olivier (A.S. Nancy-Lorraine)

ITALIE :
ZOFF Dino
GENTILE Claudio
BELLUGI Mauro
SCIREA Gaetano
CABRINI Antonio
TARDELLI Marco
ANTOGNONI Giancarlo puis 46 ZACCARELLI Renato
BENETTI Romeo
CAUSIO Franco
ROSSI Paolo
BETTEGA Roberto

Lacombe inscrit le but le plus rapide dans l'histoire de la sélection (30 secondes), mais ce n'est pas le record de la phase finale de la Coupe du Monde, détenu par le tchécoslovaque Vaclav Masek (15 secondes le 7 juin 1962). M. Hidalgo redonne à Guillou (qui surveille le meneur de jeu Antognoni) son rôle défensif.

Un grand merci à la Fédération Française de Football pour les statistiques.

Ci-dessous, l'article de Jacques Thibert dans l'année du football 1978 à propos de ce match :

Un p'tit tour et puis s'en vont

Le groupe I, celui que les Argentins ont appelé le « groupe maudit » au moment du tirage au sort, porte tous les espoirs de la France. Des espoirs un peu fous car il n'est pas question de ravir sa place de qualifié à l'Argentine, portée par tout un peuple, admirablement préparée, et nécessaire, quoiqu'il arrive, à la réussite financière du Mundial. On verra, au fil des jours, que ces craintes étaient fondées et que toutes les pressions jouèrent en faveur des hommes de Menotti. Difficile aussi d'écarter la squadra azzurra dans un pays où plus de la moitié de la population est d'origine italienne.

L'équipe de France sait depuis longtemps qu'elle joue son avenir lors du premier match contre l'Italie, le 2 juin, à Mar del Plata. Si elle gagne, elle voit s'ouvrir la route dorée. Si elle perd, elle ne refera jamais le terrain perdu.

Michel Hidalgo, traumatisé par cette affaire de tentative d'enlèvement a eu son bonheur ébréché. Il est là mais peut-être, en même temps, ailleurs, à rêver d'un football pur, libéré, dégagé des contraintes politiques. Il entend ses joueurs évoquer la possibilité de porter un brassard de deuil contre l'Italie, afin d'honorer la mémoire des suppliciés argentins et rappeler au monde que les Français se sentent concernés par tous les combats pour la liberté. Noble intention que les dirigeants réduisent parce que leurs efforts d'information au sujet des vingt-deux Français disparus ou emprisonnés pourraient en souffrir.

Hidalgo a fait, pour ce match contre l'Italie, en son âme et conscience, un choix douloureux. Il s'est privé de Dominique Bathenay, dont il estime que la condition physique est encore précaire, et il a titularisé un milieu de terrain Michel - Guillou - Platini. Il a fait un autre choix important en écartant Rocheteau au profit de Dalger. On saura plus tard que Bathenay, appuyé par son ami Platini, a rué dans les brancards, et difficilement accepté son éviction. On saura, on saura beaucoup de choses...

Tous les Français sont devant leur poste de télévision quand Marius Trésor, remis de ses émotions, entre à la tête de ses troupes pour affronter la squadra. Beaucoup ne sont pas encore assis que Bernard Lacombe, à la reprise aérienne d'un centre de Six, a ouvert le score : 42 secondes sur le compteur électronique des organisateurs, ce qui vaudra à Bernard la prime d'un chronomètre en or, d'une valeur de 10.000 francs, pour saluer « le but le plus rapide du Mundial 1978 ».

Pendant une vingtaine de minutes, l'équipe de France est en mesure de consolider son succès provisoire. Elle a déjà mieux joué dans le passé, mais elle est présente malgré quelques éclipses individuelles. Peu à peu, pourtant, la squadra azzurra prend la direction du match. Son sens de la discipline, sa rigueur, sa qualité athlétique, sa solidarité défensive, ses accélérations, son intelligence tactique font déjà, dans les esprits, la différence. Quand Paolo Rossi, un gamin de Vicenze coté à cinq milliards de lires sur le marché des transferts, reprend une balle à bout portant et fusille Bertrand-Demanes ( 29e ), on a plus qu'un doute.

On espère que Platini, le sauveur habituel de la patrie, va arranger ça. Mais Platini subit le marquage impitoyable de Tardelli. Et l'arbitre roumain M. Rainea ne se couvrira pas de gloire quand il infligera au Nancéien, un avertissement pour... simulation de penalty.

Réalistes, les Italiens le sont dans tous les sens. À la 54e minute, Zaccarelli qui a remplacé Antognoni, voit venir vers lui un ballon intéressant, sans opposition directe. Sans tergiverser, il le frappe instantanément, de volée et en diagonale. Bertrand-Demanes, vue masquée par un camarade, le regarde atterrir dans le coin de son but. Le désastre est consommé.

« C'était le match qu'il ne fallait pas perdre, constate tristement Lacombe. Décidément, nous ne serons jamais à l'heure des grands rendez-vous. »

« Ce but marqué d'entrée a desservi l'équipe de France plus qu'il ne l'a servi » explique M. Rocher, aussitôt contredit à distance par Hidalgo, lequel affirme : « Une équipe qui marque après trente secondes de jeu n'est jamais en position de faiblesse par rapport à son adversaire. Nous avons reçu une leçon de réalisme, un point c'est tout ! »

Jacques Thibert, toujours lui et dans le même ouvrage, parle de l'affaire des chaussures à 3 bandes :

Des chaussures et des bleus à l'âme

Les jours qui ont suivi France-Italie ont vu, en France, le déchaînement de la grande presse et des radios contre les joueurs de l'équipe de France. Ceux-ci ont été accusés d'avoir, juste avant le coup d'envoi, déclenché une révolte au sujet de leurs chaussures et de leurs contrats Adidas. L'affaire tient dans un verre d'eau, ou plutôt dans un pot de peinture. Contre 1.500 francs par match international et par tête de pipe, les internationaux français doivent peindre les trois bandes blanches de leurs chaussures et bien préciser aux foules en délire vers quelle marque vont leurs préférences. A Mar del Plata, excédés par le refus de la marque d'augmenter leur prime, ils ont décrété : « On nous prend pour des cons. On ne fera pas les bandes aujourd'hui. » Une indiscrétion a versé dans le domaine public cette histoire regrettable et, par bien des aspects, irritante. Mais en aucun cas, les joueurs de l'équipe de France ne méritaient cette indignité provoquée, avant toute chose, par le dépit amoureux.

Bah tiens, on va pas se gêner. Voici la vidéo du match avec Michel Hidalgo, lui-même, au micro :

Un grand merci à Retrofoot pour la vidéo du match.

A noter que sur la vidéo, on voit d'avantage Berdoll sur le banc que Guillou sur le terrain. Voilà, c'était le dernier match de Jean-Marc Guillou avec l'équipe de France. Merci Jean-Marc.