La Belle Histoire du S.C.O.

Au fond, c'est une très belle histoire que celle de la naissance du S.C.O.

Une histoire d'une morale que l'on a peine à imaginer aujourd'hui mais qu'il nous semble nécessaire de porter à la connaissance des Angevins qui l'ignorent pour la plupart.

Ce qu'il y a d'extraordinaire, en effet, dans la création du S.C.O., c'est qu'elle s'est réalisée en grande partie grâce à la coopération bienveillante du seul grand club omnisports angevin existant à l'époque, le " Club Sportif Bessonneau ", qui devait devenir plus tard, en 1919, le Club Sportif Jean-Bouin. Lorsque l'U.S.F.A., l'organisme dont dépendait ce club, fut remplacé par la Fédération Française de Football, il avait dû, en effet, abandonner son titre comportant une raison sociale (comme l'A.S. Michelin devenue l'A.S. Montferrandaise) et prendre une autre appellation.

Lors de la réunion préparatoire de la constitution du " Sporting - Club de l'Ouest ", le 15 octobre 1919, c'est bel et bien le secrétaire du C.S.J.B. de l'époque, M. Valentin Cailleau, âgé de 86 ans aujourd'hui et toujours intéressé par l'actualité sportive, qui amena en quelque sorte ce nouveau club, le S.C.O. sur les fonts baptismaux.

Ceci ne devait pas l'empêcher, par la suite, de guerroyer en toute sportivité avec les représentants de cet enfant dont il avait été, si l'on peut dire, le parrain.

Car c'est grâce au concours du C.S.J.B., et en particulier de M. Cailleau, que les formalités de constitution du S.C.O. furent accomplies, à l'initiative des frères Fortin, administrateurs de la société bancaire " Le Crédit de l'Ouest ", bien décidés à patronner et à subventionner le nouveau club.

C'est d'ailleurs là que se trouve l'origine du nom du S.C.O. et surtout du " Stade du Crédit de l'Ouest " de la rue Saint-Lazare, alors que le premier terrain du club était en réalité un champ aménagé, situé route de Nantes, qui était également la propriété du Crédit de l'Ouest.

Au début, un seul sport, le football, était pratiqué au S.C.O.

Dès le 19 octobre 1919, le S.C.O. alignait d'ailleurs deux équipes contre le Stade Nantais Université-Club avec des fortunes diverses puisque la première était battue 2-1 à Angers alors que la réserve, elle, l'avait emporté à Nantes par 3-1.

Ces deux équipes avaient la composition ci-après :

EQUIPE I
Gardien : Legendre ;
Arrières : Guyot, Viel-Lamarre ;
Demis : Bigarre, Perreault, Bruder ;
Avants : Hardy, Forget, Roger, Durbecé, Guimon.

EQUIPE II
Gardien : Durand ;
Arrières : Loussier, Garçon ;
Demis : Marais, Gouasdon, Millet ;
Avants : Thuault, Weiss, Rabeau, Marchenoir, Juin.

Le premier Comité Directeur du S.C.O. était formé ainsi :

Président : M. A. Courtin.
Vice-Président : M. Cordier.
Secrétaire : M. Ch. Courtin.
Trésorier : M. H. Gaudin.
Trésorier Adjoint : M. Cornée.
Membres : MM. Bonhomme, Durbecé, Rabeau.

Quant à la Commission Technique, elle comprenait : MM. Roger (capitaine de l'équipe I), Weiss (capitaine de l'équipe II), Juin (capitaine de l'équipe III), Trumeau et Gouasson, respectivement joueurs de l'équipe I et de l'équipe II.

Représentation très démocratique, comme on le voit, à l'énoncé de l'appartenance des membres.

En fait, l'existence de la première section du S.C.O., la section de football, fut de courte durée puisqu'elle disparut au bout de quelques mois pour laisser place aux sections d'escrime, de rugby, d'athlétisme, de natation et de hockey, qui virent le jour d'octobre 1920 à octobre 1921 alors qu'il fallut attendre 1929, sous la présidence la plus glorieuse du S.C.O., celle de M. André Bertin, pour voir renaître cette discipline qui avait été, pourtant, à l'origine de la fondation du club.

Grand Président entre tous, d'une envergure extraordinaire, André Bertin, ce Lorrain d'origine, indomptable homme d'action, colonel de réserve, directeur des Ets Cointreau, devait grandement contribuer à rendre sa place au football au sein du S.C.O. Et cela, malgré son attachement passionné au rugby qu'il avait pratiqué lui-même avec bonheur avant de conduire le " quinze " angevin en demi-finale du championnat de France, en 1936-37.

De par son rayonnement, André Bertin fut effectivement un très grand Président qui avait l'art de susciter des vocations telles celle de Georges Bleunven, son collaborateur aux Ets Cointreau, un homme délicieux, d'une rare intelligence et d'un dévouement exemplaire, qui fut l'un des principaux instigateurs de la renaissance du football au S.C.O., avec cet autre personnage important de l'époque, M. Girard-Debray. Celui-ci, grand homme d'action, dirigeait les Brasseries situées boulevard du Château, à quelques dizaines de mètres en contrebas de la statue du Roi René.

Tous deux étaient dirigeants de " L'Intrépide ", respectivement Président : M. Girard-Debray, et Secrétaire : Georges Bleunven. En dépit de leurs efforts, ni l'un ni l'autre n'avaient pu éviter la dissolution de leur société, survenue quelques mois avant une autre disparition de club, celle de " Doyenné-Sports ", qui était l'émanation des Verreries Mécaniques de l'Anjou.

Le rôle qu'ils jouèrent alors auprès du Président Général du S.C.O., André Bertin, fut d'autant plus déterminant pour la renaissance de la section de football que le Président de " Doyenné-Sports ", qui n'était autre que le Directeur des Verreries de l'Anjou, M. Epinat, était venu, tout comme les dirigeants de l'Intrépide, proposer au Président du S.C.O. de relancer le football à Angers sous les couleurs noir et blanc.

Toutes ces démarches ne furent pas sans influencer la décision du Président Bertin, séduit dès cet instant par l'idée de créer et d'animer un très grand club omnisports.

De surcroît, une crise suivie d'une scission, survenues au sein du Club Sportif Jean-Bouin, entre la section de football et celles représentant les autres disciplines, devaient emporter l'adhésion du Président Bertin tout à fait favorable au développement du football angevin, dans le respect, toutefois, des relations les plus courtoises avec les dirigeants des autres sociétés, en particulier avec ceux du C.S.J.B.

En fait, c'est le changement d'orientation de la part de la direction des Etablissements Bessonneau à l'égard de la section de football du " club Maison ", le C.S.J.B., qui devait décider de tout.

L'éventualité de la dissolution de cette section devait motiver une démarche de trois dirigeants de ce club, MM. Pichon, Filiatre et Durand, « le père Durand », comme l'appelle encore familièrement son propre fils, Robert Durand, lui-même joueur du C.S.J.B. puis dirigeant du S.C.O. auprès de M. André Bertin, afin de lui faire leurs offres de service.

Cette entrevue fut si émouvante que M. Bertin n'a pas manqué de la relater dans des termes qui méritent d'être reproduits :

« Au cours de la visite de ces trois dirigeants du C.S.J.B., avec qui le S.C.O. entretenait des rapports " mitigés ", la conversation fut, par moments, si exaltante que, de toute ma vie, je ne l'oublierai pas. Avec une très grande loyauté et une extrême largeur de vues, je fus mis au courant des nouvelles dispositions prises par les Ets Bessonneau à l'égard de la section de football du C.S.J.B. ».

Cette équipe, soulignons-le, était à l'époque la reine incontestée de tout l'Ouest au point de s'être qualifiée pour les quarts de finale de la Coupe de France de 1930-31 contre Nice, qui l'élimina par 4-1 alors qu'elle avait éliminé Strasbourg 6-1 au tour précédent.

Le C.S.J.B. de 1930-31 rivalisait, en effet, de très heureuse façon avec les grands clubs français : Rouen, Paris, Bordeaux, Strasbourg, Sète, voire même avec certaines formations étrangères : Gand, Genève, Francfort, sur qui elle comptait des succès.

Mais le professionnalisme déguisé de cette section, qui recrutait un peu partout des joueurs français ou étrangers de réputation internationale tels Poremba, Szombati, Brandweiner, etc., avait atteint une telle dimension que certains dirigeants s'en émurent et obtinrent sa mise en sommeil, décidée par les patrons des Ets Bessonneau.

Cette décision, sous-jacente à l'époque, laissait, hélas ! présager que le nom d'Angers ne serait plus représentatif à l'échelon régional voire national.

Pour l'amour de leur sport, pour l'intérêt de la ville d'Angers, certains dirigeants du C.S.J.B., pourtant attachés à leurs couleurs, vinrent alors proposer à M. Bertin de servir dans les rangs du S.C.O. s'il était disposé à les y accueillir.

« La courtoisie la plus élémentaire me commandait de rapporter cette entrevue au Directeur des Ets Bessonneau, M. Frappier », explique M. Bertin dans la relation de ces négociations.

Etant donné les règles qui régissaient alors les rapports entre gens de bonne compagnie, M. Bertin sollicita, bien entendu, un entretien avec M. Frappier avant d'entreprendre quoi que ce soit.

Cette entrevue, on s'en rend compte maintenant, eut en quelque sorte une signification quasi-historique puisque c'est de ce jour que l'existence de la section de football du S.C.O. prit jour, en réalité.

Tous apaisements ayant été donnés à M. Bertin par M. Frappier quant à ses intentions au sujet de la section de football du C.S.J.B., que les Ets Bessonneau ne souhaitaient plus aider financièrement, le Comité Directeur du S.C.O., informé par son Président, ratifia les accords proposés par lui.

Ceux-ci avalisaient, si l'on peut dire, la démarche des dirigeants du C.S.J.B. auprès du Président du S.C.O., en dépit d'une vive réaction de certains membres du C.S.J.B. qui acceptaient mal de voir disparaître le plus beau fleuron de leur club.

L'existence du C.S.J.B. cessant virtuellement du point de vue fédéral, rien ne s'opposait plus à ce que le S.C.O. accueille joueurs et dirigeants de cette section.


de gauche à droite : COURTIN Père, GOURDON, TRUMEAU, X, RABEAU, COURTIN fils, X, X, LAVEANT, CARLIER, SALTON, PATRIE, X. Match de Coupe de France - Saison 1919-1920 contre Angoulême.

A suivre ... peut-être.

Ce sont les 3 premières pages du Livre d'Or du SCO (1972), écrit par le grand journaliste sportif du Courrier de l'Ouest, Tony Effling. Merci à Benoît B. pour les scans.

Quand Tony dit que la section football du SCO disparut au bout de quelques mois, je dois avouer que j'ai des doutes. Il me semble que la section football du SCO est restée en place jusqu'en 1924 (à vérifier). Par contre, le SCO est bel et bien revenu en force pour la saison 1929-30 ... et en noir et blanc.